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LE FORUM DU PSYCHOLOGUE : MA RESPONSABILITE DE PSY DANS L’ACCUEIL des violences sexuelles subies par mes patients

Le constat est glaçant : en 2020, l’IPSOS a estimé qu’une personne sur 10 en France, soit 6,7 millions de personnes, serait susceptible d’avoir subi un inceste (et cela n’inclut que ceux qui déclarent l’avoir subi). Ce chiffre est une estimation très basse à cause de l’amnésie infantile extrêmement fréquente.  Autre chiffre effarant : 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles qui viennent s’ajouter au chiffre précédent. L’immense majorité des centaines de patients que j’ai reçus en séance psy ont subi des violences sexuelles.

L’ouvrage de Bruno Clavier « Ils ne savaient pas- pourquoi la psy a négligé les violences sexuelles » m’a profondément touché et a remis en question des années de pratique. Quel accueil ai-je fait  de toutes ces violences dans les premières années de ma pratique ? J’ai toujours été très critique de l’approche freudienne et de ses fondements scientifiques. Le livre de Bruno Clavier, qui en est un spécialiste, raconte comment Freud, qui a lui-même été incesté, a modifié radicalement et frauduleusement sa théorie pour mettre en avant la responsabilité de l’enfant dans ce qui lui arrive ! Sa première théorie était justement que les violences sexuelles étaient à l’origine des névroses avant de faire un virage à 180 degrés et de décrire l’enfant comme sujet de perversion.. Souvenez-vous également des dérives choquantes de la psychanalyste Françoise Dolto qui déclarait il y a 30 ans que la petite fille incestée pouvait tout à fait dire non à son père ! On croit rêver….

La victime est désignée responsable de ce qu’il lui arrive et l’auteur du traumatisme est, quant à lui, largement exonéré de sa responsabilité !

Je voudrais m’adresser à vous, victime, homme, femme ou enfant, et vous dire que je vous crois, que votre parole est indiscutable, que vous pouvez déposer ce qui est parfois indicible, et être entendu.

Lorsque j’entends les propos de certains collègues psy, rapportés par des patients, j’ai parfois honte; j’ai envie de m’excuser au nom de notre profession de rajouter de la violence dans l’accueil du traumatisme subi. J’ai envie de croire que la formation des psy change et intègre petit à petit des présupposés théoriques permettant l’accueil des victimes de violences sexuelles. Professionnels, osons nous positionner et laisser derrière nous une soi-disant neutralité qui ne peut exister et s’avère mortifère. Osons être des thérapeutes « situés », c’est à dire capables d’annoncer nos présupposés, l’endroit d’où nous parlons et engagés à lutter contre toutes les discriminations systémiques (patriarcat, racisme, validisme,…).

Il y aurait aussi beaucoup à faire au niveau de l’accueil des gendarmes et policiers, des juges et légistes, de l’école, et plus généralement de tout professionnel en charge de personnes. Pour vous faire une idée de la situation globale, je vous invite à écouter le podcast « 20000 lieux sous ma chair » :

https://www.binge.audio/podcast/le-coeur-sur-la-table/20-000-lieues-sous-ma-chair-par-caroline-pothier

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