TAMBOUR ET TRANSE

par Mélanie GRIVAUX


Selon la cosmogonie du chamanisme, l’Univers est un continuum d’Etres Vivants, dont nous faisons partie, avec lesquels nous pouvons communiquer ; qu’ils soient l’esprit des plantes, des éléments, d’animaux, d’ancêtres…. Nous accédons à ce Monde Invisible par l’intermédiaire de la transe, induite elle-même par des plantes, des chants, des danses et, dans toutes les traditions, par le son et le rythme d’un tambour. 

Pour atteindre la transe, qui est un état modifié de conscience, il est nécessaire de nous défaire un temps de nos conditionnements socioculturels, de notre ego et  » d’accepter de ne pas tout comprendre « . Alors, notre perception du temps, de l’espace et de nous-mêmes n’est plus la même. La communication avec le monde du Vivant et des Esprits peut alors s’établir, tout comme l’accès à  notre inconscient, notre intuition, notre monde intérieur. 

Les sciences cognitives et neurosciences ont montré qu’un processus répétitif à un certain niveau d’intensité est le stimulus le plus efficace pour passer d’une conscience du quotidien à une conscience « plus élargie ». 
Le son souvent grave des tambours et leurs battements à plus de 220 coups par minute nous amènent dans les ondes Thétâ, entre 3 et 8Hz, dans cet état entre la veille et le sommeil ; celui dans lequel notre esprit garde sa vigilance et notre corps est engourdi. Les différentes études et imageries d’un cerveau en transe mettent en exergue l’inhibition de la sphère cérébrale cartésienne tandis que l’espace émotionnel et intuitif de notre cerveau « s’enflamme », la rapidité de transmission du flux synaptique passe de 300 millisecondes à 50, notre force est décuplée, les sensations de douleur diminuent, nous avons accès aux informations subtiles. Des chercheurs émettent même l’hypothèse que la « transe amplifie notre potentiel de diagnostic, d’empathie et d’autoguérison en levant l’inhibition des circuits neuronaux subconscients ». C’est dire que nous avons des avantages à nous entraîner à entrer en transe et communiquer avec le monde invisible ! Parce qu’il s’agit bien d’un entraînement ! Laurent Huguelit parle de « muscle chamanique » qu’il faut travailler avec assiduité.

Dans la tradition chamanique, le tambour n’est pas qu’un simple outil pour nous amener à la transe, il est sacré, il est « le rythme du Monde » , « le lien entre la Terre et les Cieux ». Sa fabrication représente pour beaucoup de nations un rituel initiatique important. Il se confectionne avec la peau d’un animal qui choisit d’être abattu par l’initié. Celui-ci entre alors en contact avec l’Esprit de cet animal, les deux âmes se connectent ; celle de l’animal résonnera à chaque battement du tambour. L’objet devient très intime et sacré pour celui qui l’utilise. Dans d’autres traditions, comme en Sibérie, le tambour est offert à l’initié, en reconnaissance de tout son parcours. La fabrication des objets chamaniques, dont le tambour, n’est donc pas l’alpha mais plutôt l’oméga de l’apprentissage chamanique !

Sur tous les continents, le tambour accompagne et soutient les voyages chamaniques. Il est le lien entre les mondes, assure l’ancrage ; il est le point de repère spatial et temporel de ceux qui l’écoutent ou en jouent.

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